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PROLOGUE et autres évenements...

Quand je leur ai dit que je partais pour Jurong ils m'ont dit que j'étais malade. Pas qu'ils sachent ce que c’était ni même ou ça pouvait bien crécher. Non c'est juste que j'ais l'habitude de faire des trucs barrés, voir carrément borderline… Qu’est ce que cela  aurait été s’ils avaient su que Jurong était le point de départ d'un tour du monde en vélo... sinon oui j'ai une Spondylathrite Ankylosante.

 

 

Bangkok J - 7

Je glisse du lit vers le sol, lâchant une bordée de jurons quand mon crâne entre en contact avec le sol  avec la délicatesse  d'une valise balancée sur le tarmac d'un aéroport turc,  puis rampé péniblement jusqu’à la salle de bain.  Le lavabo est trop haut, alors j’enlace la cuvette  des WC et vomit 4 jours et trois nuits de cuite. J’ai l'impression que je vais mourir, j'en ai même envie. Je me sens comme si des éléphants jouaient au foot avec mon petit corps fragile. 80 heures plutôt,  mon médecin m'avait annoncé que le traitement miracle à la SPA n'existait pas plus à Singapour qu'a Paris. Bien fait pour ma gueule, si je voulais un miracle j'avais qu’à aller à Lourdes.

 

Bugis quelques heures plus tard.

L'avion a touché la piste d’atterrissage de Changi avec trois heures de retard. Pas la peine de claquer 150 dollars pour une chambre. Je me dirige vers Bugis et retrouve une vieille guesthouse ou j'avais mes habitudes 15 ans plus tôt. Putain 15 ans, ça aurait du faire tilt dans ma tête. À croire que je n’avais pas encore complètement déssoûlé.

 

Rien n'a changé, les mêmes gargotes aux pieds de l'immeuble. Les mêmes photos délavées de fishhead curry et les mêmes dégaines avachies, assommées par la moiteur. Assises la parce qu’ils n’ont pas la clim et que somme toute, c’est leur seule chance de ne pas devenir dingue à se faire bouffer par les moustiques dans leurs piaules.  Les mêmes odeurs de graillon qui envahissent l'entrée déjà brûlante de la guesthouse.  Je m'engage dans le couloir et tombe sur la collection de fanions de foot qui déjà à l’époque ornaient le premier étage,  les mêmes couloirs blancs qui mènent au vieux comptoir  ou j'avais remplit ma fiche  une, deux, trois,  je ne sais même plus combien de fois lors d'escales folles et sauvages. Payer, s'engager vers le troisième. Etage ouvrir la porte et sourire en voyant que la chambre est  restée la même, laisser les souvenirs  me submerger, revivre les sensations de l'époque.  Descendre  vers les douches en traversant la salle commune déserte mais ou, ici et la trônent des souvenirs plus ou moins périssables, reliques d’aventures extraordinaires ou pas. L’endroit est tel qu'il y a 15 ans. Il devait déjà  être comme ça trente ans plus tôt, et j'imagine qu’il sera le même dans dix ans. C'est un de ces lieux ou te poser et échapper à la réalité avant d'être recraché dans le tourbillon de la vie. Certains endroits ont emmagasiné trop d'énergies pour que le temps  puisse les changer.

 

Je sors de la douche une serviette autour de la taille, la salle déserte c'est entre temps remplie de jeunes  qui refont le monde, j’ai pas l'air con avec ma serviette. Je salue et avance en bombant le torse et retenant ma respiration. Je me fais interpeller  par des fans de tatouages. Un poisson combattant bleue cobalt tout neuf attire l'attention d'une gamine de 20 berges elle passe la main dessus "j'adore les  tatouages récents, ils sont en relief...". Je pense à Yasser Arafat histoire que ma serviette ne se prenne pas du relief elle aussi... Un jeune type me lance : « -  c'est cool que vous soyez la, je veux dire à votre âge  faut être cool pour aller dans une guesthouse... » Je souris  genre « hé oui », mais dans ma tête je l'insulte dans toutes les langues que je connais,  regrettant de ne pas avoir un hérisson à portée de la main pour  lui faire un  examen de la prostate avec... le pire c’est que c’est enlardé a voulu être gentil.

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